Belgique : 10 000 travailleur.ses dans l’enseignement, élèves et parents en manifestation à Bruxelles pour une meilleure éducation

Dix mille travailleur.ses de l’éducation, élèves et parents sont descendus dans les rues de Bruxelles le 10 février, dans le cadre d’une grève du secteur de l’éducation organisée par les syndicats francophones du pays. La manifestation s’est dirigée vers le ministère de l’enseignement de Wallonie-Bruxelles, pour demander de meilleures conditions dans les écoles pour les enseignants et les élèves. Une délégation de grévistes a rencontré la ministre et ses collaborateurs, qui n’ont toutefois pas réussi à promettre plus de 100 € d’augmentation par enseignant sur trois ans, une revalorisation salariale qui, selon les grévistes, était attendue depuis longtemps (et qui ne couvre pas du tout bien sûr  l’augmentation du coût de la vie que subissent les travailleur.ses).

En tout état de cause, leurs revendications vont bien au-delà d’une augmentation des salaires. Le système éducatif belge a souffert d’importantes coupes budgétaires au cours des 20 dernières années au moins, ce qui a entraîné une mauvaise qualité des infrastructures, des pénuries de personnel et une baisse significative de la qualité de l’enseignement offert aux élèves. Les enseignants racontent que les bâtiments s’écroulent, que le chauffage est souvent en panne et que le personnel de nettoyage n’est pas suffisant. Ils rapportent également qu’ils sont obligés de faire des heures supplémentaires, afin de couvrir les tâches administratives, car le personnel administratif fait également défaut. Non seulement les gouvernements n’embauchent pas de personnel de secrétariat, mais ils ont en plus imposé des procédures d’évaluation et d’administration de plus en plus longues et compliquées, que quelqu’un doit bien sûr faire ! Si le personnel administratif n’est pas là, alors ce sera aux enseignants de s’en occuper !

En outre, la qualité de l’enseignement s’est considérablement détériorée au cours des dernières années. Le niveau de connaissances de nombreux élèves est inférieur à celui correspondant à leur classe dans des cours de base comme les mathématiques, la physique ou le français ; ce pourcentage peut atteindre 30 %. Parfois, certains enfants qui vont à la troisième classe de l’école primaire, ne sont même pas en mesure de lire et écrire correctement. Des inégalités flagrantes sont également à noter: ces déficiences sont bien plus importantes dans les écoles des zones pauvres que dans celles des zones riches.

Cette situation est devenue encore pire pendant la pandémie. Des protocoles sanitaires et de nettoyage ont été imposés, mais il n’y avait pas suffisamment de travailleur.ses pour les mettre en œuvre. Dans le même temps, les écoles n’ont pas reçu suffisamment de matériel de nettoyage ni d’équipements de protection (masques, désinfectants, etc.), de sorte qu’il a été impossible d’appliquer ces mesures nécessaires. L’un des grévistes présents à la manifestation en a parlé de manière très éloquente :

“On a des bâtiments moisis, des plafonds qui tombent, des fenêtres qui ne s’ouvrent pas mais qu’on nous demande d’ouvrir”

Un professeur d’anglais a également déclaré:

“Se retrouver, quand une collègue est malade, à 35 en classe, tout ça, c’est difficile pour enseigner de manière correcte” ;

il est clair qu’aucune leçon correcte ne peut avoir lieu et qu’aucun protocole sanitaire ne peut être maintenu dans de telles conditions.

Toutes ces raisons sont plus que suffisantes pour expliquer pourquoi 10.000 personnes ont participé à la manifestation, alors que la participation à la grève était également très élevée. C’était la plus grande grève et manifestation dans le secteur de l’éducation depuis 2011. La participation était bien supérieure à ce que les syndicats avaient prévu.

La colère s’est accumulée au fil des ans et la gestion contradictoire et controversée de la pandémie par le gouvernement a été la goutte qui a fait déborder le vase. Au cours des deux dernières années, les écoles ont ouvert et fermé, non pas en fonction des conditions in situ ou de la situation de la pandémie, mais plutôt en fonction de l’urgence, pour l’économie, que les parents aillent travailler. Les écoles ont en fait été utilisées comme des garderies. Selon un enseignant de Bruxelles, au moins 30 % des enseignants déclarent qu’ils en ont assez et qu’ils sont proches du burn-out.

Il est également important de noter que certains enseignants de Flandre ont également participé à la manifestation, même si les syndicats flamands n’avaient pas appelé à la grève.

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Vu la situation donc, les enseignants, le personnel administratif, les parents et les élèves réclament : 

  • Des équipements de protection afin de respecter les protocoles sanitaires(masques, désinfectant, autotests) ;
  • Améliorer les infrastructures : réparer les bâtiments existants, mais aussi aménager et utiliser les bâtiments publics vides pour en faire des écoles;
  • Une campagne de recrutement massif d’enseignants, de personnel administratif, technique et de nettoyage ; l’objectif est  de ne pas avoir plus de 15 élèves par classe ;
  • Arrêter les réformes qui augmentent la charge administrative et qui font de la gestion financière une priorité. Au lieu de cela, une éducation de qualité pour tou.tes doit être la priorité.

Comme l’a dit un syndicaliste, la réponse du ministère a été à côté de la plaque et leurs demandes n’ont pas été entendues. Par conséquent, 20 000 travailleu.ses devraient descendre dans la rue la prochaine fois, et la prochaine fois devrait être très proche.

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